THE HAIRY GIRAFFE… EN CHINE

Après un mois en Chine dont 15 jours au Yunnan, il est l’heure de dresser le bilan. Comment avons-nous vécu ce voyage ? Quels ont été nos joies, nos déceptions, nos interrogations, nos doutes, nos découvertes ? Il ne s’agit évidemment pas du bilan d’un pays mais de celui d’un voyage. Tel que nous l’avons perçu, individuellement, subjectivement.


Nous, c’est François et Benjamin, coiffeurs de girafes et amateurs de voyages. Sur ce blog, retrouvez nos voyages, nos astuces, nos humeurs et tout le nécessaire pour devenir coiffeur de girafes et partir explorer le monde. Un blog honnête avec des photos garanties 100% sans filtres ni retouches.

Le bilan de Benjamin

Consacrer 4 semaines à la Chine lors d’un voyage autour du monde de 8 mois était un pari risqué. Surtout après une expérience indienne en demi-teinte… 

Les avis des voyageurs sur la Chine sont souvent mitigés et nombreuses sont les personnes dubitatives lorsqu’on leur annonce qu’on va y passer près d’un mois. Les tensions économiques et géopolitiques qui font les gros titres de l’actualité depuis plusieurs années ont de toute évidence terni l’image du pays aux yeux des Occidentaux. Et la crise du Covid n’a pas arrangé les choses…

Pourtant, le pays m’attirait et je tenais absolument à en découvrir une partie. Pour moi, la Chine était synonyme d’un pays à la culture millénaire engagé dans une transformation économique et sociale ultra-rapide. Une combinaison fascinante.

Et je n’ai pas été déçu ! La Chine a été un réel coup de cœur. Après quelques jours à Hong Kong et Macao, nous avons découvert le Yunnan, Chengdu, Xi’an et Pékin. Que de contrastes avec les clichés qu’on peut avoir sur la Chine ! Oubliez les images d’un pays sale, qui ne sait faire que des imitations de mauvaise qualité et qui est en retard sur l’Occident. 

Bien sûr, nous avons visité les parties les plus touristiques du pays et nous ne sommes pas allés dans les campagnes reculées mais il reste évident que la Chine est aujourd’hui un pays moderne. Très moderne, même. Et propre. Les métros de Kunming ou Chengdu feraient honte à ceux de Paris ou New York. Les rues sont sans cesse nettoyées. Les gens sont souriants et aidants. Et si les personnes âgées ont encore des manières disons mal dégrossies (oui, beaucoup d’hommes se râclent la gorge bruyamment et crachent), les plus jeunes se comportent mieux que la plupart des Occidentaux. Et puis, surtout, il y a tellement de choses à voir et à faire ! Sites historiques, vieilles villes, montagnes enneigées, temples, monastères… La Chine offre de multiples découvertes passionnantes. 

Être un touriste étranger (a fortiori caucasien) aujourd’hui en Chine, c’est sortir de la masse. Alors que les touristes occidentaux peuplent les rues de Bangkok, les campagnes vietnamiennes et les temples japonais, nous étions presque systématiquement les seuls Blancs dans chaque ville et sur chaque site visités (à l’exception notable de Pékin et, dans une moindre mesure, à l’armée de terre cuite de Xi’an). 

Impossible alors de passer inaperçus. Nous avons été l’objet de demandes de photos répétées, de rires curieux, et de regards permanents de toutes sortes, allant de l’hospitalité à l’hostilité en passant par l’incrédulité. 

Mais quel dommage de ne pas parler chinois ! Parce les Chinois n’hésitaient jamais à nous aborder, quitte à faire de longs monologues totalement incompréhensibles pour nous. Et si Google Translate aide un peu, j’aurais adoré échanger davantage avec toutes ces personnes qui ont engagé la conversation.

Cette quasi absence de tourisme international a donné une dimension particulière à notre voyage. J’ai eu la sensation d’être le témoin privilégié de la société chinoise telle qu’elle est aujourd’hui, sans filtre, sans intermédiaire. Et alors que voyager à l’autre bout du monde n’a jamais été aussi facile, grâce aux outils technologiques autant qu’à une certaine uniformisation et mondialisation, la Chine offre encore cette expérience de dépaysement total et ce sentiment d’être vraiment à l’étranger, sans nos repères habituels.

Mais si le touriste occidental est majoritairement l’objet de curiosité pour les Chinois, il est aussi un grain de sable gênant pour le système politique. Le regard extérieur que le touriste étranger porte sur le pays ne peut que déplaire au régime communiste.

Parce que, bien sûr, il ne faut pas être naïf. Si la Chine a été un vrai coup de cœur pour moi, impossible d’ignorer la machine de surveillance et de contrôle mise en place par le gouvernement. Voyager en Chine, c’est aussi visiter un pays qui a souvent un double visage.

Si l’on est surpris par le silence des rues dû à l’omniprésence de voitures électriques, il ne faut pas en conclure que la Chine est un pays au bilan environnemental enviable. Le ciel de Xi’an recouvert d’un épais manteau de pollution nous l’a rappelé avec acuité. De même, si l’on ne peut qu’être émerveillé par tant de technologie, impossible non plus de ne pas être effrayé par l’usage qui en est fait. La collecte et la centralisation des données des moindres faits et gestes de chaque citoyen sont effrayantes. La reconnaissance faciale est partout et tous les déplacements et paiements sont reliés à la carte d’identité de la personne. Billets de train, tickets d’entrée des sites, billets de banque et carte bancaire… : tout cela est devenu obsolète. Il suffit de présenter son visage à la caméra pour entrer dans une gare, visiter un musée ou payer son repas. Et, partout, il est devenu presque impossible de payer autrement. Le choix a disparu. 

Quiconque a lu 1984 ou est familier avec les travaux d’Hannah Arendt ne peut que s’inquiéter d’une pareille tendance… 

Dans ce système implacable, le touriste étranger agit comme un intrus. Le système tout entier a été conçu pour surveiller les 1.4 milliard de Chinois, pas pour faciliter la vie du touriste. Voyager en indépendant en Chine est un vrai casse-tête. Si vous ne souhaitez pas donner vos informations bancaires à WeChat, impossible de réserver un billet d’entrée à la réserve de pandas de Chengdu ou à l’armée de terre cuite de Xi’an. Si vous espérez accéder à vos emails ou à vos sites Internet favoris, il faudra vous munir d’un VPN (et de beaucoup de patience, parce que les VPN ne parviennent pas toujours à bien contourner la censure chinoise). Si vous souhaitez prendre le train, il faudra trouver un agent pour scanner votre passeport à chaque entrée et à chaque sortie, ce qui peut engendrer bien des complications. Même pour acheter un ticket de métro à Pékin, le touriste étranger ne peut pas utiliser les distributeurs automatiques et doit trouver l’unique guichet de la station. La simplicité des démarches du quotidien est conditionnée à la collecte des données personnelles.

Malgré la libéralisation de l’économie et les réformes de Deng Xiaoping dès la fin des années 1970 (qui ont permis ce développement économique fulgurant), la Chine reste un pays tourné vers lui-même. Sans doute un pays qui se voit comme un monde à part, et qui se pense à part des autres. Comme les États-Unis, la Russie ou l’Inde, la Chine est un de ces gros pays qui ont une culture bien à eux. Et la culture chinoise est tellement différente qu’y voyager nous permet de mieux comprendre à quel point les choses les plus triviales ne sont pas universelles : par exemple, les Chinois ne comptent pas sur les doigts de la même façon qu’un Européen (un crochet de la main représente le chiffre 9 et un poing représente le 10). Et comme le pays est extrêmement peuplé et que la population s’est largement enrichie ces dernières décennies, le tourisme domestique y a explosé. C’est certainement l’une des raisons pour lesquelles l’anglais est quasi inconnu de tous, y compris des employés de l’hôtellerie. Mais les infrastructures sont là, ce qui rend le voyage plus facile.

Et puis, quand on se retrouve face à des temples grandioses, des jardins magnifiques, des montagnes enneigées, des sites plurimillénaires, les difficultés pour y accéder nous paraissent bien insignifiantes. Voyager en Chine demande une organisation minutieuse et une certaine patience au quotidien, mais le pays en vaut vraiment l’effort. Un vrai coup de cœur dans notre périple de 8 mois autour du monde !

Retrouvez le bilan de François :

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