THE HAIRY GIRAFFE… AUX PHILIPPINES
Après deux semaines aux Philippines, il est l’heure de dresser le bilan. Comment avons-nous vécu ce voyage ? Quels ont été nos joies, nos déceptions, nos interrogations, nos doutes, nos découvertes ? Il ne s’agit évidemment pas du bilan d’un pays mais de celui d’un voyage. Tel que nous l’avons perçu, individuellement, subjectivement.
![]() Nous, c’est François et Benjamin, coiffeurs de girafes et amateurs de voyages. Sur ce blog, retrouvez nos voyages, nos astuces, nos humeurs et tout le nécessaire pour devenir coiffeur de girafes et partir explorer le monde. Un blog honnête avec des photos garanties 100% sans filtres ni retouches. |
Le bilan de Benjamin
Avant de préparer notre voyage de 8 mois autour du monde, je n’avais aucune image des Philippines. Mais à peine avais-je commencé à chercher sur Internet des idées de voyages en Asie que je suis tombé sur des millions de photos. Disons-le tout de suite : les Philippines sont un pays d’images. Instagram notamment a beaucoup contribué à la notoriété des Philippines, diffusant ad nauseam les mêmes images de lagons paradisiaques.
Et qui pourrait ne pas avoir envie de voir soi-même de tels endroits ? Alors oui, je plaide coupable : l’idée de passer deux semaines dans des lagons aux couleurs surréalistes, m’a séduit. C’était le lieu idéal pour faire une pause soleil dans un voyage de 8 mois où nous passons plus de temps dans des paysages urbains ou des forêts humides que sur des plages.
Et puis, notre voyage en Polynésie française m’avait laissé une telle impression de paradis que j’avais envie de vivre une expérience similaire.
Mais les Philippines ne sont pas la Polynésie française. Si les photos peuvent donner l’impression que les deux se ressemblent, c’est parce que les Philippines sont un pays d’images. Et si Instagram nous a appris une chose, c’est que les images sont souvent trompeuses.

Nous avons passé 8 jours à Coron et El Nido. Objectivement, oui, les environs de ces deux villes sans aucun charme abritent de véritables pépites. Des paysages paradisiaques. Mais, sur les réseaux sociaux, les images circulent vite. Et massivement. Alors les plus beaux lagons des Philippines attirent du monde. Beaucoup de monde. Trop de monde peut-être. Et cet afflux est mal géré par les communautés locales et les acteurs du tourisme.
Le tourisme balnéaire aux Philippines se limite à du ‘island hopping’. Autrement dit, vous partez en bateau pour la journée et on vous conduit d’un endroit à un autre. On vous donne entre 30 et 60 minutes à chaque fois pour prendre vos photos avant de repartir.

On comprend vite que les Philippines sont une destination idéale pour les influenceurs et tous ceux qui veulent remplir leur Instagram de magnifiques photos. Mais le touriste qui souhaite se reposer ou simplement profiter de ces endroits incroyables restera sur sa faim.
On se retrouve rapidement à partager une petite plage avec plusieurs centaines de personnes, ou à faire la queue pendant 30 minutes pour accéder à un point de vue. On prend sa photo et on repart.
Le tourisme en ‘island hopping’ aux Philippines fonctionne comme une usine. Tous les bateaux partent au même moment du même endroit, suivent le même itinéraire, et proposent exactement les mêmes formules, aux mêmes prix. Et les stratégies qu’on trouve sur Internet pour éviter les foules en partant plus tôt ou en bateau privé coûtent cher et ne sont plus guère efficaces.
Tout cela est dommage parce qu’il devient impossible d’apprécier à leur juste valeur des endroits paradisiaques quand on a 30 minutes pour en profiter et qu’autour de soi, des dizaines de touristes musclés ou en bikinis prennent des poses ahurissantes que leur drone capte depuis le ciel.
La meilleure décision que nous avons prise aux Philippines : louer un kayak trois jours d’affilée pour prendre notre temps sur quelques plages et profiter enfin de ces paysages incroyables sans foule ni chrono. Durant ces journées à El Nido, nous avons enfin pu apprécier la beauté des lieux, nager quand on le souhaitait, regarder les nuages s’écouler dans le ciel et même nager avec une tortue !
À la fin de ce voyage aux Philippines, je suis un peu frustré. Frustré de ne pas avoir vu davantage de culture. Alors que durant les tours en Polynésie française, les guides partageaient sans cesse des histoires et anecdotes sur leur culture, aux Philippines, on n’aborde jamais ces aspects-là. Les grandes villes n’offrent pas non plus beaucoup de sites culturellement riches. La culture aux Philippines m’a semblé bien plus latina qu’asiastique : quel contraste avec le Cambodge ou Taïwan, d’où nous venions ! L’héritage d’une colonisation espagnole de 300 ans doublée d’une influence nord-américaine évidente (en ville, malls et fast-foods semblent structurer le quotidien). J’aurais voulu en découvrir davantage, approfondir ces aspects.

Frustré également de ne pas avoir vu une autre facette du pays. J’avais beaucoup hésité lors de la préparation de ce voyage, à inclure quelques jours dans le nord de Luzon, vers Banaue, et je regrette de ne pas l’avoir fait. Cela m’aurait peut-être permis de voir un autre visage des Philippines, un tourisme peut-être plus respectueux de la nature et qui ressemble moins à une usine.
Je suis convaincu que les milliers d’îles des Philippines renferment d’innombrables lieux aussi beaux que les quelques lagons des tours. À trop vouloir concentrer les flux vers les mêmes lieux, on multiplie les effets néfastes du surtourisme. Les coraux sont blanchis, les sites bondés, le prix des hébergements, restaurants et transports délirant… Et la multiplication des taxes environnementales n’arrangera pas la situation…
À l’heure où de nombreux pays, qui gèrent un tourisme de masse depuis bien longtemps, tentent de rediriger les flux de touristes vers des sites moins fréquentés, il est étonnant de voir à quel point aux Philippines tout est fait pour que les touristes visitent tous les mêmes endroits.
Après deux semaines aux Philippines, le pays me semble un exemple frappant des limites à visiter des destinations d’images. Oui, on revient avec notre appareil photo plein de clichés magnifiques mais l’expérience n’a pas été à la hauteur. Contre toute attente, j’aurai passé deux semaines bien plus enrichissantes et agréables à Taïwan, dont les paysages ne peuvent pourtant absolument pas rivaliser avec ceux des Philippines.

L’expérience touristique ne peut pas se limiter à la prise de photos, même si les guides des bateaux nous intimaient sans cesse à prendre toujours plus de photos.
Pour un pays, abriter des endroits aussi paradisiaques est une chance autant qu’une responsabilité. Et en gérer la mise en tourisme ne peut pas se réduire à faire tourner les touristes sur des bateaux toute la journée, sans se soucier de la formation des guides, des conditions sanitaires des restaurants, du rapport qualité-prix des hébergements, ou de la protection environnementale sur le long terme.
La bonne nouvelle, c’est que l’explosion du nombre de touristes et celle des prix conduisent immanquablement à des déceptions. Et un touriste déçu, c’est un touriste qui ne recommande pas la destination. Un contrepoids aux images qui pullulent sur Instagram et aux campagnes marketing massives du pays. Il y a alors fort à parier que le jour où de trop nombreux touristes seront insatisfaits du rapport coût-expérience, les Philippines prendront les mesures nécessaires pour mieux valoriser leur patrimoine et mieux en gérer la mise en tourisme. Et tout le monde sera alors gagnant !
Retrouvez le bilan de François :
Et retrouvez tous nos autres articles sur les Philippines :